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lundi 11 juin 2007

Les 7 leçons de la surf attitude



Voici un article intéressant d’Emmanuel Poncet, publié hier dimanche dans le quotidien suisse Le Matin, sur la « surf attitude ».


Sauriez-vous glisser dans la vie comme sur les vagues ? Pour les adeptes du surf, l'un ne va pas sans l'autre et leur planche les porte aussi à se transformer intérieurement. Voici quelques-uns de leurs enseignements. A méditer aussi sur la terre ferme.


Souvent considéré comme un sport marginal réservé à une poignée d'éphèbes australiens un peu écervelés, la pratique du surf recèle pourtant une vraie philosophie de vie. «Le surf comme métaphore de l'existence est aussi puissant pour un Parisien ou un Londonien que pour un Australien», confirme la pratiquante et écrivaine australienne Fiona Capp (auteur notamment de Ce sentiment océanique, Actes sud, 2005). En hawaïen, le surf se dit he'e nalu: he'e pour «couler comme un liquide» et nalu qui indique le surgissement d'une vague et le liquide amniotique enrobant le nouveau-né.

C'est le navigateur James Cook qui a découvert le surf au XVIIIe siècle, en Polynésie. Depuis son expansion dans les années 1960, ce sport n'a cessé de démontrer qu'il était bien plus qu'une discipline physique. Plutôt une discipline de vie, aussi exigeante qu'exaltante. Voici ses sept grands principes.

1. Accepter les creux de la vague

Les images spectaculaires de surfeurs filant au coeur du tube font souvent oublier la cruelle réalité: «Surfer, c'est avant tout accepter de ramer», explique Emmanuel Brunet, jeune quadra, directeur artistique et surfeur passionné. Pour moins d'une minute environ de glisse - l'instant unique -, il faut accepter de «nager-ramer» longtemps sur sa planche afin de rejoindre le lieu de formation des vagues.

«C'est une école d'humilité, poursuit l'aficionado. La jouissance de glisser est indissociable de l'effort que l'on a fourni pour y parvenir.» L'analogie avec la vie se fait dès lors très naturellement. Le surf enseigne aussi bien la nécessité de l'effort (on n'a rien sans rien) que l'acceptation des temps faibles.

«Comment apprendre à survivre aux marées basses de l'existence?» interroge l'Américaine Anne Morrow Lindbergh dans Solitude face à la mer (Pocket, 2003). La réponse du surfeur est simple : patience et longueur de temps. Jusqu'à la prochaine vague qui, c'est sûr, vous portera. Comme l'a démontré par le devenu culte Brice de Nice (film de James Huth, 2005).

2. Prendre des risques et des coups

En surf, les occasions de se blesser sont fréquentes. Toucher le fond ou y rester accroché. Etre projeté sur la plage ou sur des rochers. Prendre la planche dans la figure. Se faire étrangler par le leash (la «laisse» qui relie le surfeur à sa planche)... «Cela peut évoquer les conduites à risque adolescentes, explique le psychanalyste Didier Lauru, celles où l'on repousse toujours plus loin les limites».

3. Saisir le bonheur par intermittence

Le surfeur sait jongler avec les contraintes de la vie quotidienne. Il a souvent une double vie pour assouvir sa passion. D'un côté, un métier, un salaire suffisant, une vie de famille sédentaire. De l'autre, un matériel coûteux (trois planches par an, à six cents euros pièce), des déplacements nombreux et un trip nomade.

«Je ne cesse d'aller et venir entre deux modes de vie, dit Fiona Capp. Je suis frustrée de ne pouvoir surfer quand j'en ai envie, mais je fais contre mauvaise fortune bon coeur. Pourtant, il est incontestable que le plaisir que je prends à surfer est renforcé par le côté épisodique, changeant et intermittent de cette activité.»

4. Vivre en dauphin, éviter carpes et requins

Le dauphin est l'un des symboles favoris du surfeur. Il incarne le mouvement, l'intelligence et l'élégance.

Pour Dudley Lynch et Paul L. Kordis (auteurs de La stratégie du dauphin, Ed. de l'homme, 2006), il devrait inspirer tous les jours notre façon de vivre. Selon eux, le monde est un grand bassin peuplé de carpes et de requins qui, chacun à leur manière, gèrent une pénurie aussi frustrante que permanente. Les carpes marinent dans l'eau stagnante, victimes statiques, attendant toujours mieux. Les requins, en prédateurs agressifs, croient qu'il vaut mieux dévorer son voisin pour sauver ce qui peut encore l'être.

Le dauphin, lui, comme le surfeur, sait profiter des «vagues du changement». Il suit sa voie, son intuition, en bonne intelligence avec les autres et les éléments. Il se fait même respecter du requin.

5. Se positionner dans l'adversité

Le militaire ou le gendarme se tiennent toujours «de face». Le surfeur, en revanche, aborde les choses et les gens «de côté». Ainsi, en situation de conflit, il pratiquera plus facilement l'esquive. «Un jour, dans une bagarre de rue, j'ai mesuré l'apport concret du surf, raconte Paul, qui pratique du côté de Biarritz. J'ai su éviter les coups. Encore mieux, tel un judoka, j'ai improvisé une prise qui utilisait l'énergie de mon agresseur... qui est tombé à terre.» S'il y avait un précepte de surfeur, ce serait celui-là: ne jamais aller contre.

6. Devenir le plus léger possible, ne jamais forcer

«Quand on est sur une planche, poursuit Paul, il faut se faire le plus léger possible. N'appuyer que pour rebondir sur une vague. Dans la vie, c'est pareil. Il ne faut pas trop forcer, ne pas trop appuyer là où ça résiste. Sinon, on plonge. Et on se fait mal.»

Dans la vie comme sur les vagues, le grand art consiste à accompagner le mouvement. C'est l'un des points essentiels de la philosophie du surf, développée notamment par Gibus de Soultrait, rédacteur en chef de la revue Surf Session. Ne jamais vouloir orgueilleusement «faire sa vie», mais toujours «faire avec elle». Faire avec les éléments, toujours plus forts que soi. Avec la matière, toujours plus puissante. Avec le mouvement, toujours plus grand que soi.

7. Croire en des forces supérieures

L'image zen et mystique du surf n'est pas usurpée. Même si on oublie souvent que les pratiquants grillent beaucoup de kérosène et de litres de bière pour assouvir leur passion...

«Quarante secondes. Ça dure quarante secondes, une belle vague. Et tu t'en souviens pendant dix ans», écrit Michaël Sebban dans La Terre promise, pas encore (Pocket, 2004).

Comme la pratique religieuse, la pratique du surf semble défier les lois terrestres. «Au fond, le surfeur rêve d'arrêter la mort, résume Emmanuel Brunet. Etre comme l'eau qui passe. Etre noyé dans le rien. Ou dans le tout».

3 commentaires :

Anonyme a dit…

Ouahhhh! C'est un sport d’ouf! Et moi qui croyais que je risquais ma vie à faire du roller sans casque! Respect!

Anonyme a dit…

Surfeur = moine shaolin (moine combattant, zen...). Donc l'être quasi idéal pour tous ces auteurs !!!! Ne connaissant pas de surfeur je reste sceptique....

Anonyme a dit…

Vive l'esprit surf, Man ! J'm'en vais me rouler un gros tarpé !

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